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5 juillet 2022 Nouveau droit des sociétés: Augmentation et réduction de capital (no. 6)

Le nouveau droit des sociétés, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023, apporte de nombreux changements. Dans cet article de notre série de blogs sur le nouveau droit des sociétés, nous mettrons en lumière ce qui devra être pris en compte.

Outre la possibilité d'introduire une marge de fluctuation du capital dans les statuts de la société anonyme - voir à ce sujet notre blog "Nouveau droit des sociétés anonymes - La marge de fluctuation du capital" - la révision du droit des sociétés modifiera d'autres dispositions du Code suisse des obligations importantes pour la pratique, notamment en ce qui concerne l'augmentation conditionnelle du capital, la réduction du capital et ce que l'on appelle le « coup d’accordéon ». Ces modifications seront examinées plus en détail ci-après.

Ajustements de l'augmentation conditionnelle du capital-actions

Selon la législation actuelle, l'assemblée générale (l'AG) peut décider d’une augmentation conditionnelle de son capital en accordant dans ses statuts le droit d’acquérir des actions nouvelles (droit de conversion ou d’option) aux créanciers de nouvelles obligations d’emprunt ou d’obligations semblables contre la société ou les sociétés membres de son groupe ainsi qu’aux travailleurs.

Désormais, les membres du conseil d'administration (le CA) et les tiers seront également inclus en tant que destinataires possibles du capital conditionnel. Ce changement formalise la pratique libérale déjà en vigueur aujourd'hui, par exemple lorsque des options sont émises en faveur d’actionnaires (warrants) lors d'une augmentation de capital ou que des membres du CA reçoivent des options sur actions comme élément de rémunération, qui sont à chaque fois garanties par du capital conditionnel.

L'émission d'instruments correspondants est soumise à la condition que le droit préférentiel de souscription des (autres) actionnaires ait été valablement limité ou supprimé, ce qui requiert en principe des "justes motifs". Dans le cas des sociétés cotées en bourse, il sera désormais possible de limiter ou supprimer le droit préférentiel de souscription même sans justes motifs si les actionnaires ont la possibilité d'acquérir les titres correspondants en bourse à des conditions équitables, préservant ainsi leurs intérêts.

Jusqu'à présent, l'exercice des droits de conversion ou d'option garantis par du capital conditionnel (ou la renonciation à ces droits) devait se faire par écrit, ce qui n'est parfois pas respecté dans la pratique (par exemple, lorsque des signatures électroniques non reconnues en Suisse sont utilisées). Désormais, il sera possible de prévoir dans les statuts des moyens électroniques pour exercer ces droits (ou pour y renoncer).

Ajustements à la réduction ordinaire du capital-actions

Par analogie avec l'augmentation de capital, il sera également possible de définir un montant maximum lorsque l'AG adopte une résolution sur la réduction du capital-actions. Dans la pratique, cette procédure est déjà en partie considérée comme admissible sous le droit actuel, par exemple dans le cadre de programmes de rachat d'actions, pour lesquels l'étendue finale du rachat d'actions sur une période plus longue et leur annulation ultérieure n'est pas encore claire au départ.

D’un point de vue rédactionnelle et par souci de cohérence, la décision de l'AG devra indiquer le mode de réduction du capital, c'est-à-dire soit par réduction de la valeur nominale soit par destruction d’actions.

La décision de l'AG devra également contenir des informations sur l’affectation du montant de la réduction du capital : paiement en espèce, compensation (par exemple avec une obligation de paiement en cours) ou conversion en réserves ou en capital étranger.

Autre nouveauté : ce n'est plus seulement l'AG qui pilote la réduction du capital, mais le CA a un rôle à jouer. De manière analogue à la procédure en deux étapes pour l'augmentation de capital, le CA prépare la réduction et la réalise en modifiant les statuts et en prenant la décision de constatation par acte authentique.

D'un point de vue procédural, le délai dans lequel le CA doit requérir l'inscription de la réduction du capital-actions auprès de l'Office du registre du commerce est en outre prolongé de trois à six mois, comme pour l'augmentation ordinaire du capital.

L'appel aux créanciers est également simplifié ; au lieu de trois publications dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) avec un délai de réaction de deux mois pour les créanciers, il suffira à l'avenir d’une seule publication, selon laquelle les créanciers devront communiquer à la société leur demande de sûretés dans un délai de 30 jours.

Ajustements de la réduction de capital en cas de bilan déficitaire

Le droit en vigueur autorise déjà certains allégements dans la procédure de réduction du capital lorsque le capital-actions est réduit pour supprimer partiellement ou complètement un excédent passif constaté au bilan résultant de pertes et que le montant de la réduction du capital ne dépasse pas celui de l’excédent passif à supprimer (réduction de capital dite « déclarative » ou « nominale »). Dès 2023, les dispositions régissant la réduction ordinaire du capital qui concernent la garantie des créances, les comptes intermédiaires, l'attestation de vérification et les constatations du CA ne s’appliquent pas.

Par ailleurs, la loi définit désormais le contenu du rapport d'audit sur la base duquel l'AG décide de la réduction de capital déclarative.

Facilitation du « coup d’accordéon »

La possibilité de procéder à une réduction du capital suivie d’une augmentation du capital (également appelée « coup d’accordéon »), qui existe déjà dans le cadre de la législation actuelle (CO 732a), présente un changement important. À des fins d’assainissement, le capital-actions peut être momentanément réduit en dessous du capital minimum de CHF 100’000 prévu par le droit des sociétés (souvent même jusqu'à zéro), s'il est immédiatement réaugmenté à nouveau à concurrence d’un montant au moins équivalent. Cet important instrument de restructuration est désormais réglementé dans une disposition spécifique, dont le contenu correspond largement à la pratique antérieure. Toutefois, il y a un changement important en ce qui concerne le degré de libération. Contrairement à aujourd'hui, le nouveau capital ne doit plus obligatoirement être entièrement libéré. Il suffit que les apports effectués ne soient pas réduits, c'est-à-dire que le degré de libération antérieur ne soit pas diminué.

Ce changement justifie également de ne pas appliquer les dispositions régissant la réduction ordinaire du capital qui concernent la garantie des créances, les comptes intermédiaires, l’attestation de vérification et les constatations du CA. Les autres dispositions régissant l'augmentation ordinaire du capital restent applicables. Une modification des statuts n'est pas non plus nécessaire, pour autant que le nombre et la valeur nominale des actions ainsi que le montant des apports effectués restent inchangés.

En revanche, si le capital-actions est porté à un montant inférieur au montant antérieur - sauf en cas de bilan déficitaire (voir à ce sujet ci-dessus) - , ce qui est également possible en vertu du droit actuel, toutes les dispositions relatives à la réduction et à l'augmentation ordinaires du capital sont applicables.

Les mêmes règles simplifiées qui s'appliquent à la réduction et à l'augmentation simultanée du capital-actions s'appliquent désormais expressément à la constellation inverse et comparable (augmentation et réduction simultanée du capital-actions au montant initial).

Perspectives

Outre la nouvelle institution juridique de la marge de fluctuation du capital, la révision du droit des sociétés apporte des clarifications, parfois de nature rédactionnelle, parfois de nature constitutive, aux dispositions du droit des sociétés anonymes relatives au capital-actions. La réduction du capital en cas de bilan déficitaire et le « coup d’accordéon »" dans un but d'assainissement sont, dans la pratique, des mesures importantes (bien que pas toujours suffisantes) à la disposition du CA pour remédier à une perte de capital ou un surendettement. Aussi, l'allègement des conditions du « coup d’accordéon » (limité au maintien du degré de libération antérieur) est une amélioration positive, car elle accroît la marge de manœuvre du CA dans une situation qui peut être critique pour la société.

Votre équipe VISCHER se tient à votre disposition pour répondre à vos questions.

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Auteurs: Lukas ZüstThomas Steiner-KrizajPeter Kühn 

Traduction: Nigar MustafazadeDamien Conus

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