
Contexte
L'ancien conseiller national et président de l’Association des propriétaires fonciers, Hans Egloff, a déposé le 18 juin 2015 une initiative parlementaire dans le but d'éviter les sous-locations abusives. Concrètement, l'article 262 du Code des obligations devrait être modifié et complété. Le Parlement a adopté un projet de loi allant dans ce sens lors de la session d'automne 2023. L'association des locataires a lancé un référendum contre ce projet. Les citoyens auront le dernier mot lors de la votation populaire du 24 novembre 2024.
Situation juridique actuelle
La disposition actuelle sur la sous-location prévoit que le locataire est autorisé, avec le consentement du bailleur, à sous-louer tout ou partie de la chose (art. 262 al. 1 CO). Le bailleur peut également donner son accord de manière implicite. Le refus de consentement par le bailleur n'est admissible que s’il existe l'un des motifs mentionnés à l'al. 2:
- en cas de refus du locataire de communiquer au bailleur les conditions de la sous-location (tous les éléments importants du contrat, tels que le loyer, le nom du sous-locataire, l'usage prévu, la durée et la désignation de la partie sous-louée, doivent être divulgués) (let. a) ;
- si les conditions de la sous-location sont abusives par rapport à celles du contrat de bail principal (la ratio legis est d'éviter un gain excessif par la sous-location) (let. b) ; ou
- si la sous-location entraîne des inconvénients majeurs pour le bailleur (p. ex. en cas de suroccupation du logement) (let. c).
Le locataire est garant envers le bailleur que le sous-locataire utilise la chose conformément à l’usage prévu dans le bail principal. Le bailleur peut s’adresser directement au sous-locataire pour l’obliger à respecter cette incombance (al. 3).
Critique de la réglementation actuelle
Les bailleurs critiquent la réglementation actuelle, car le concept de sous-location est régulièrement utilisé de manière abusive.
Les principales critiques portent notamment sur
- L’absence de consentement: la sous-location est souvent effectuée sans en informer le bailleur, c'est-à-dire sans requérir son consentement. Le bailleur n'est souvent informé de la sous-location qu'après avoir reçu des informations de la part des voisins (augmentation significative des passages, plaintes à cause du bruit, etc.).
- La sous-location permanente: les bailleurs estiment que la sous-location n'est pas destinée à être une situation permanente. Au contraire, la sous-location devrait permettre au locataire de ne pas devoir quitter son logement en cas d'absence temporaire, par exemple pendant une année professionnelle à l'étranger, et de pouvoir le réintégrer par la suite.
- Gains abusifs: par ailleurs, les bailleurs souhaitent se protéger contre les cas de sous-location récurrents, par lesquels un locataire profite de conditions avantageuses et réalise un profit abusif avec la sous-location, sans même avoir l’intention d’habiter personnellement le logement. Dans les baux de longue durée, les loyers peuvent être inférieurs à ceux des logements disponibles sur le marché. Ceci peut inciter à sous-louer les locaux d'habitation plutôt qu’à résilier le bail.
- La difficulté d'administration de la preuve: l'administration de la preuve pour la partie qui doit l’apporter s'avère, de lege data, complexe. Les tribunaux reconnaissent au bailleur le droit de refuser de donner son accord à la sous-location, si le locataire n'a pas l'intention de réintégrer ultérieurement le logement. La pratique montre que la simple affirmation du locataire selon laquelle il réintégrera l'objet personnellement, suffit à renverser le fardeau de la preuve. Dans ces cas-là, c’est au bailleur qu’il incombe de prouver que le locataire n'a pas l'intention de retourner dans le logement. La preuve d’éléments subjectifs, tels que la volonté intime du locataire, ne peut pratiquement jamais être apportée par le bailleur.
Contenu du projet de loi
La révision partielle adoptée par le Parlement sous-divise désormais l'article 262 CO en six alinéas. En principe, la sous-location totale ou partielle reste autorisée. L'article 262 CO révisé concrétise et codifie des dispositions déjà en vigueur sur la sous-location, d'une part, et élargit la portée de l'article, d'autre part, comme nous l'expliquons ci-après.
Si le locataire a l'intention de sous-louer tout ou partie de la chose, il a désormais besoin du consentement écrit du bailleur (al. 1).
Ainsi, le consentement devra être obtenu par une demande de sous-location écrite du locataire, sauf s'il en a été convenu autrement par écrit (al. 2). La loi codifie désormais les exigences relatives au contenu de la demande de sous-location: les noms des sous-locataires (let. a) ainsi que les conditions du contrat, notamment l'objet de la sous-location, son usage, son loyer et sa durée (let. b) sont impérativement requis.
Si les informations fournies dans la demande de sous-location changent pendant la durée de la sous-location, le locataire est tenu d'en informer le bailleur (al. 3).
Les motifs de refus (al. 4) reposent largement sur l'ordre juridique existant. Toutefois, contrairement au droit en vigueur qui contient une énumération exhaustive des motifs de refus, il est désormais prévu de laisser place à des motifs supplémentaires qui ne sont pas expressément mentionnés dans la loi. Le refus du locataire de divulguer les éléments nécessaires à la demande de sous-location conformément aux al. 2 et 3 constitue encore un motif de refus de consentement du bailleur (let. a). En outre, par analogie avec la disposition en vigueur, les conditions abusives de la sous-location par rapport au bail principal peuvent justifier le refus de consentement du bailleur (let. b). Comme c'est le cas actuellement, le bailleur ne doit pas subir d'inconvénients majeurs du fait de la sous-location (let. c). Un nouveau motif de refus est également présent lorsque la durée prévue pour la sous-location dépasse deux ans (let. d).
L'alinéa 5 correspond à l'actuel art. 262 al. 3 CO.
Le bailleur doit désormais disposer d'un droit de résiliation extraordinaire si locataire sous-loue la chose sans son consentement, fait de fausses déclarations ou ne communique pas les changements dans la demande de sous-location, après lui avoir adressé un avertissement écrit, resté sans effet (al. 6). Cette disposition permet au bailleur de sanctionner ces manquements fautifs du locataire par une résiliation extraordinaire du bail, avec un délai de résiliation d'au moins 30 jours.
En ce qui concerne l'administration des preuves, il convient de rappeler que des éléments subjectifs, tels qu'une prétendue intention de revenir ne peuvent tout simplement pas être prouvés. Dans ce contexte, la demande écrite de sous-location avec l'obligation d'indiquer la durée de la sous-location, l'obligation d'informer le bailleur des changements ainsi que le nouveau motif de refus en cas de sous-location prévue pour plus de deux ans, servent à empêcher les sous-locations abusives et à compenser le déséquilibre existant dans l'administration des preuves.
Le 24 novembre 2024, le peuple décidera du sort de cette proposition législative.
Les membres de l'équipe immobilière de VISCHER se tiennent à votre disposition pour répondre à vos questions juridiques et vous fournir des informations juridiques plus détaillées sur ce sujet.
Auteur: Florian Fallegger
Traduit de l'original par: Louise de Gottrau